Publié le 19/02/2018

“Il barbiere di Siviglia” à l’Opéra de Marseille

Dans une mise en scène de Laurent Pelly “Il barbiere di Siviglia ” à l’Opéra de Marseille rend ses lettres de noblesse à la musique.
Laurent Pelly, le metteur en scène, a visé juste ! Innovateur, inventif, ce “Barbier de Séville” représenté à l’opéra de Marseille en ce mois de février a reçu un excellent accueil. Rendant à Rossini la place qui lui est due, Laurent Pelly place ses chanteurs dans un décor épuré, poétique, intemporel, qui en magnifie l’intensité musicale et vocale. Le spectateur entre de plain-pied dans l’univers rossinien.

Le Barbier de Séville à l’Opéra de Marseille : un décor épuré, une partition théâtrale

Une fenêtre qui s’ouvre, laissant apparaître Rosine au milieu des portées, les lignes noires de ces mêmes portées pour barreaux : une symphonie en noir et blanc. Les personnages deviennent autant de notes de musique sur les partitions dont ils se servent pour leur jeu de scène. Face à la virtuosité dont doivent faire preuve les chanteurs dans cet opéra, Laurent Pelly réussit doublement où d’autres ont échoué, signant une “partition” scénique de haut-vol, magnifiquement servie par tous les interprètes.

Ici, le théâtre entre par la grande porte, un tour de force combinant l’intelligence de la mise en scène au génie de l’œuvre, jouant d’effets visuels nouveaux. Dans cet univers en noir et blanc, le rythme du jeu des personnages en juxtaposition parfaite avec la musique, pigmente la scène. De pingouins-notes en ballade sur la partition, en soldats pupitre au poing, le toujours excellent chœur de l’opéra de Marseille devient un personnage à part entière : la facétie des remarquables « Frères Jacques » doublée de frénésie musicale. Une mise en scène audacieuse qui fait mouche.

Le chef d’orchestre Roberto Rizzi Brignoli dirige avec brio, fougue et passion.

Habitué à jouer cette partition difficile, Roberto Rizzi Brignoli y ajoute désormais l’expérience. C’est pur, propre, dynamique, ni trop rapide, ni trop lent, au crescendo réussi. Le chef communique à l’œuvre une couleur particulière, un son qui vibre sans outrance.

Florian Sempey, un magnifique Figaro aux airs de blouson-noir

S’il est un rôle qui accompagne Florian Sempey c’est bien celui de Figaro, taillé sur mesure pour ce jeune bourré de talent et débordant de vigueur. Le timbre est puissant, la technique vocale est effarante de qualité, la diction parfaite. Le baryton pousse à l’extrême les difficultés maitrisant les vocalises avec une facilité qui n’a de facile que l’apparence. Fi du personnage uniquement jovial, place au manipulateur intéressé, jusqu’à en craindre, pour le spectateur, les gestes un peu trop appuyés lors d’un rasage risqué pour le vieux Bartolo. Superbement tatoué, l’italianité ancrée en lui, Florian Sempey campe un splendide Figaro. Les spectateurs l’ovationnent sans attendre.

La merveilleuse mezzo-soprano Stéphanie D’Oustrac est une malicieuse Rosine, piquante et mutine.

Avec un charme fou à la limite de la rouerie, elle chante dans les positions inconfortables que lui assigne Laurent Pelly (allongée sur la partition), démontrant ainsi des capacités vocales brillantissimes. Aussi impressionnante par la puissance de sa voix que par les couleurs de son timbre, la Rosine de Stéphanie D’Oustrac est un succès.